Dérive des rives

Le projet Dérive des Rives a été initié par l’association La Turbine (Lyon), avec les partenariats du Conseil régional Rhône-Alpes ainsi que du FEDER et de la galerie du Réverbère (Lyon). Des extraits ont été publiés dans l’ouvrage Glissement de terrain, publié en 2018 par LOCO        
2012

Dérive des rives


Dérive des rives prend comme point d’appui et d’ancrage le pont d’une petite péniche descendant le Rhône. Cette série s’intègre dans un ensemble de réalisations photographiques dont l’eau est le fil conducteur depuis plusieurs années.
 
Un premier voyage sur une « péniche école » en 1983, au cours de laquelle j’ai accompagné Elisabeth Autissier sur le Rhône, m’a laissé cette impression indélébile de la présence des berges qui, enserrant tel un étau le courant puissant, suggéraient dans le lointain, formé par les obliques des rives, un point de convergence, une perspective d’une rencontre possible.
Cette notion du double sous-tend mon approche du projet. Comme lors d’un pas de deux, les rives opposées et leurs caractéristiques singulières forment un couple lié par le milieu du fleuve, son insondable mystère. Sont deux également la berge et le miroir d’eau dont elle s’élève, ciel et terre, terre et eau, eau et ciel… La question de la jointure, du point de contact, d’une rencontre hypothétique, les unit. Ou serait-ce, au contraire, le désir d’une impossible séparation ?
Régulièrement l’utilisation du miroir revient dans mon approche du paysage contemporain.
À la fois fabuleux moyen de suggérer une extension inattendue de l’espace, le miroir y opère aussi une fragmentation, qui, malgré le cadrage attentif, inclut sa part de hasard incontrôlable et surprenant. D’autant plus que les photographies de Dérive des Rives sont prises pendant la navigation. Dans ce jeu de profondeur qui se heurte à la surface réfléchissante, l’apparition d’éléments hors champ dans l’image vient troubler la perception et induit soit une fluidité cinématographique, soit, au contraire, une implosion kaléidoscopique de brisures rectangulaires.
 
Les paysages du Rhône, bordant dans leur diversité l’avancée du fleuve du nord vers le sud, sont approchés comme deux partenaires se faisant face au-delà de ce qui les sépare. Comme les pages d’un livre liées par la fluidité de l’écriture.
Ainsi se construisent des chapitres selon la matérialité des espaces traversés. Aux  séquences vertes et boisées succèdent celles qui, plus urbaines ou industrialisées, témoignent des enjeux multiples qui ont écrit l’histoire du Rhône au fil du temps.

    Beatrix von Conta, septembre 2012

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